Réalisation : Manuelle Martelli
Scenario : Manuelle Martelli et
Alejandra Moffat
Date : 2022 Chili
Durée : 95 mn
Acteurs principaux :
Carmen : Alice Küppenheim
Elias, le blessé : Nicolas Sépulveda
Le curé Sanchez : Hugo Medina
Le mari de Carmen : Alejandro Goïc
La cuisinière : Carmen Martinez
A/ SA
Mots-clés : Appartenance sociale – altruisme – Etat policier – oppression – alliances
Une chilienne d’un milieu aisé accepte la demande de son curé : celle d’accueillir un jeune homme blessé par balle. Elle dispose d’une maison de campagne, au bord du Pacifique. Nous sommes en pleine période de répression et de surveillance policière. Pinochet est au pouvoir. Cette femme d’un médecin en vue n’a pu, elle-même, faire des études médicales, car son père était « vieux jeu ». Elle soigne le jeune-homme avec ce qu’elle peut retirer de l’hôpital où exerce son conjoint. Une relation de sympathie s’installe avec le blessé. Elle est amenée à prendre des risques pour le mettre plus en sécurité, pendant sa convalescence, ce qui la conduit à rencontrer un autre prêtre, qui agit également en résistant pacifique. Elle manque se faire prendre et ne doit son salut qu’à son image de grand-mère bourgeoise. Le film se termine d’ailleurs par une fête familiale où elle garde son image de gentille conforme, alors que la police a fini par atteindre ses objectifs quant au blessé et au second curé qui avait accepté de la protéger. Le curé prescripteur de l’action s’en tire, si on peut dire, par une mutation décidée par son évêque.
Rétrospective sur une ambiance de dictature
Ce film est l’œuvre d’une réalisatrice, admiratrice de l’action de sa grand-mère, au temps de la dictature qu’a connu le Chili. Il complète avec originalité et finesse quelques œuvres marquantes, dont « Santiago Italia » de Nanni Moretti (2018). Il montre que la résistance à un ordre injuste, plus ou moins criminel, peut être porté par des résistants pacifiques. Il montre aussi que le courage n’exclut pas le danger, même en usant de prudence.
En définitive, découvrir des films sur les dictatures classiques permet de mieux saisir les analogies avec des formes de dictature nouvelles, telles celles que nous vivons aujourd’hui, en France.
L’Etat laisse se développer les conditions d’un chaos sociétal pour justifier une présence policière accrue, un système de surveillance généralisée, des informations qui organisent la désinformation, la peur et l’hostilité, un laisser-faire de fait face aux désordres induits, donnant à la majorité de la population le sentiment d’être prise en otage ou menacée. Le contrôle social prend la forme nouvelle de contraintes numériques croissantes qui impactent des secteurs d’activité, jusque-là préservés.
Il reste à souhaiter au pays et aux multiples régions du monde affectées par la violence, quelle qu’en soit la forme, de nombreuses et nombreux résistants pacifiques, dans l’espoir d’une prise de conscience collective qui redonne leur place à l’intérêt général et au bon sens.