11 Janvier 2021
Le confinement / déconfinement – déjà un an – distend les liens affectifs, supprime des « plaisirs innocents », crée une ambiance qui génère de la peur, de la passivité, de la dépression…
« Comment éviter la dépression » est une question d’actualité !
Rappelons que la personne alcoolique a trouvé dans le produit le moyen d’éviter la dépression jusqu’au moment où l’effet-médicament s’inverse, sans même faire intervenir les raisons concrètes qui peuvent déprimer quelqu’un, engagé dans la spirale des ennuis et des soucis relationnels, sociaux et physiques de l’alcoolisation. La personne alcoolique, souvent, décolle insensiblement du Réel et telle la cigale de la Fable se trouve dépourvue quand la bise s’installe.
Avant d’aller plus loin, vous pouvez décider de ne pas prendre connaissance de ce que je vais signaler, pour mieux apprécier quelles sont les réponses que vous imaginez et pratiquez. Je propose d’appeler cette façon de procéder la « méthode Alexandre », puisque c’est à Alexandre que revient l’idée d’une mise en réflexion spontanée, face à la thématique proposée.
Mon cerveau lent a besoin de temps pour distinguer des pistes.
Lorsqu’une personne interrompt l’alcoolisation, elle doit être en situation d’affronter le réel. Quelquefois, la récupération des capacités cognitives est immédiate et complète. La perte de lucidité était strictement corrélée au taux d’alcoolémie. D’autres fois, le cerveau est endommagé. Assez souvent, le cervelet, organe de l’équilibre, et le cortex, lieu de la pensée, sont atrophiés, comme en témoigne l’élargissement de l’espace entre les circonvolutions. La récupération sera lente. Quelquefois, les dommages sont irréversibles.
À l’arrêt de l’alcool, les nuages se dissipent. Le décor se dessine de plus en plus nettement. La dépression, jusque là masquée, peut s’installer. Elle prend souvent la forme de l’ennui, d’une absence de désir, d’une difficulté à trouver du plaisir. Cet état n’est pas la dépression. Il ne répond pas nécessairement à un anti-dépresseur. Comment, à l’arrêt de l’alcool, éviter la dépression ?
Les premiers temps qui suivent l’arrêt de la consommation correspondent à une période de deuil : deuil du produit, deuil de l’anesthésie, de la fuite en avant, deuil de la toute-puissance artificiellement procurée par l’alcool. Parler de l’alcool, compter les jours, les semaines et les mois d’abstinence sont des manières de faire le deuil du produit. On se lasse de tout, même de célébrer le « cher disparu ». Le deuil amorcé, il devient possible de passer à autre chose.
Revenir sur son histoire est une étape importante dans le dépassement de l’addiction. L’entretien d’histoire inaugure cette étape. La synthèse qui en résulte aide à prendre du recul. La psychothérapie individuelle et le travail en groupe intégratif sont de nature à mieux comprendre les ressorts invisibles de l’alcoolisation. Peu à peu, le sujet prend conscience des différents facteurs ayant abouti à la dépendance alcoolique. Il apprend à se connaître mieux. Encore faut-il qu’il dispose d’interlocuteurs soignants ou aidants capables de l’aider dans ses prises de conscience.
Une personnalité dépressive ne peut se transformer de façon radicale. En s’effaçant, la sidération dépressive peut faire place à une dépressivité redonnant place aux initiatives, aux rencontres, à la créativité. Une personnalité dépressive est le plus souvent ambivalente. Une partie d’elle reste compatible avec l’humour, le rire et la joie. Une étape décisive sera sa capacité à s’accepter telle qu’elle est mais également à se relier aux autres, à ceux qui en valent la peine, à l’Autre, si on peut appeler ainsi la recherche spirituelle, mais également l’acquisition d’une philosophie de vie et d’une conscience politique.
À ce stade, la personne est soutenue par un épicurisme pragmatique et citoyen. L’alcool est loin. Le sujet a achevé un parcours initiatique. Quel que soit le temps qu’il lui reste, la suite vaudra la peine d’être vécue. La suite, c’est chaque jour qui se présente quand les yeux s’ouvrent et qui s’achève quand les yeux enfin se referment avec la sensation d’avoir vécu une nouvelle journée.
En fonction de votre expérience, qu’avez-vous à dire pour éloigner la dépression ?