Lundi 9 novembre 2020
D’une manière cyclique, la notion d’obscurantisme revient dans le discours ambiant. Jusqu’à information contraire, l’expression s’oppose « Aux Lumières » dont la période prérévolutionnaire aurait été porteuse.
L’obscurantisme se définit comme une négation du savoir, le refus obstiné de reconnaître des choses démontrées. L’obscurantisme se double d’intolérance. La dictature obscurantiste a trouvé une forme d’apogée dans l’affrontement entre le géocentrisme du Système de Ptolémée, repris par l’Eglise, et l’héliocentrisme, dont la défense par Galilée faillit le conduire au Bûcher.
Jusqu’à quel point, le siècle des Lumières justifie son intitulé est une affaire à considérer. Les périodes fastes pour « le progrès », les découvertes et les innovations n’ont pas manqué depuis le début de l’aventure humaine. Avec le recul, le Siècle des Lumières a correspondu à l’émergence de l’idéologie républicaine (et des abus qui l’ont précédée et accompagnée), des Droits de l’Homme et du Citoyen – abstraction aussi louable que théorique – mais aussi de l’essor du libéralisme et du développement ultérieur des totalitarismes dont nous avons pu mesurer les effets dévastateurs. Tout système de pensée idéologique véhicule un potentiel d’obscurantisme, souvent éloigné ou même opposé de ce qu’il promettait ou annonçait.
Notre problème n’est pas d’évoquer les obscurantismes du passé, ni même les obscurantismes actuels de ceux qui, au nom de leur idéologie, qualifient d’obscurantistes ceux qui ne partagent pas leurs croyances. Notre séance va essayer de distinguer des racines de l’obscurantisme de la problématique alcoolique.
La problématique est-elle concernée par des obscurantismes. Lesquels ? Comment établir qu’une affirmation, une conduite, une méthode est obscurantiste en alcoologie ? Quelles sont les racines des obscurantismes présents dans le champ des addictions ?
Hors sujet sur le « fanatisme »
Nous avons eu connaissance de la présentation, par le biais d’un article, d’un ouvrage publié par les éditions du Cerf (96p, 10€) : « Du fanatisme, quand la religion est malade », d’un dominicain, Adrien Candiard. Nous n’avons pas (encore) lu ce livre mais l’article propose des éléments d’analyse intéressants.
Pour ma part, j’aimerais savoir comment, aujourd’hui, une religion pourrait être « en bonne santé ». Il serait d’ailleurs pertinent de poser la question de savoir comment notre République ou encore le Libéralisme économique pourraient être en « bonne santé ».
Ce jeune religieux élargit et renouvelle l’approche du fanatisme, religieux ou profane, par des réflexions d’ordre théologique. Il critique, en premier lieu, la position consistant à s’approprier Dieu en l’enfermant dans un corps de doctrine qui fixerait les croyances, les rituels, les hiérarchies, les identités, en assimilant l’ensemble à la Vérité en marche. À partir du moment où l’on se croit détenteur de la Vérité, quel qu’en soit le contenu, le risque est de basculer dans l’intolérance et de légitimer toutes les formes de violence pour se donner raison.
Le Dominicain pointe les limites de l’humanisme des Lumières. Après les guerres de religion (et leurs actes de barbarie), les Lumières ont contribué à « pacifier » l’espace public. Cependant, en marginalisant le Religieux, dans ses formes les plus élaborées, elle a laissé le champ libre aux formes les plus archaïques des religions.
Au sens sociologique, l’intégrisme vise un courant du catholicisme et le fondamentalisme des courants du protestantisme nord-américain. De même, l’islamisme est un amalgame obscurantiste. Le Djihadisme relève pratiquement d’une forme de banditisme haineux favorisé par les réseaux sociaux. Le salafisme est un sectarisme borné, d’un autre temps, typiquement source de fanatisme et d’« d’opium du peuple ».
Adrien Candiard appelle au dialogue interreligieux. Malgré ses précautions faisant appel au sentiment amical indispensable à un dialogue de qualité, il manque, de mon point de vue, d’ouverture d’esprit. Il n’y a aucune raison d’entretenir des cloisonnements entre croyants et incroyants soucieux de ne pas écarter les besoins portés par les religions. Le dialogue peut être amical, en faisant appel à l’esprit critique.
Il définit la prière comme un dialogue silencieux avec Dieu (du Dieu que l’on a en soi, ou que l’on reconnaît chez l’autre, ou dans la Nature). Il ne dit rien sur la Foi.