31 octobre 2022
L’estime de soi est un thème récurrent dans le petit monde de la psychothérapie. Il peut être intéressant d’en discuter en utilisant les grilles de lecture employées pour la problématique alcoolique.
L’estime de soi dépend pour une part décisive de la période de l’enfance. Les fonctions parentales peuvent ne pas avoir été correctement assurées pour un grand nombre de raisons. Les personnalités de la mère, du père, de la fratrie, du cercle familial ou relationnel peuvent avoir induit des atteintes de l’image de soi, du sentiment de sécurité ou encore de l’identité.
Au-delà des interactions avec des proches, l’environnement est également à considérer, particulièrement à l’adolescence, avec les effets des comportements problématiques à l’école primaire et au collège. Le caractère néfaste de certaines relations est de nos jours amplifié par les réseaux sociaux. Le parcours scolaire n’est pas sans conséquence. Il peut favoriser une dévalorisation ou au contraire une estime de soi satisfaisante. L’obsession narcissique de certains parents que leur enfant soit le « Meilleur » peut avoir des conséquences contreproductives sur l’évolution de ce dernier. Il en est de même de l’attitude inverse, si elle véhicule de l’indifférence ou de l’hostilité.
Quoiqu’il en soi, à un moment, le sujet est censé faire ses preuves, à partir de son héritage culturel et de ce qu’il a intégré comme ligne de conduite. Il est regrettable que ce qui est appelé la crise de l’adolescence aboutisse à adopter les transgressions ordinaires et le refus des contraintes que suppose l’acquisition des connaissances nécessaires.
L’estime de soi a beaucoup à voir avec le Moi idéal, c'est-à-dire à ce que le sujet aspire à être et qu’il considère comme digne de considération. Une situation fréquemment retrouvée oppose la valeur intrinsèque de la personne, et ses potentialité, à l’image que lui renvoi un milieu dépréciateur. De l’enfant qui-n’a-que-le-droit-de-se-taire à l’enfant-roi, il y a une large marge qui autorise l’amorce de dialogues sérieux, si toutefois les parents sont aptes ou disposés à les assurer.
La pression idéologique des milieux d’appartenance, tout autant que le laxisme ou les facilités liées aux positions sociales des parents, ne facilite pas le développement du jugement critique de l’enfant. L’inexistence des valeurs éthiques familiales, les dissensions de couple, le laisser-faire face aux abus du numérique, les pratiques « festives » systématiques, le dédain de la culture critique au profit de la culture « classante » aboutissent, en quelques années, à transformer les potentialités des jeunes en candidats aux addictions et à l’insignifiance. Selon la formule d’Éric Bern le fondateur de l’analyse transactionnelle : le petit prince devient crapaud.
Tout au long de l’existence, l’estime de soi risque d’être mise à mal par l’effet des conditions actuelles du travail ou les effets des marginalisations, par la difficulté à être soi, au quotidien.
L’estime de soi gagne à s’émanciper du regard des autres, à se constituer en fonction de critères d’appréciation indépendants des opinions circulantes. Les addictions ont plusieurs fonctions face à une estime de soi défaillante. Elles peuvent aussi bien entretenir, un temps, l’égo que susciter une défaillance profonde de l’estime de soi.
Il est difficile de savoir garder une estime de soi satisfaisante tout au long de sa vie car il est si facile de faillir et si commun de trahir. Comme me l’avait dit, approximativement, une relation amicale, de façon romantique : « Je saurai si je mérite ma propre estime face au peloton de mon exécution ».
Quels regards portez-vous sur la notion « d’estime de soi » ?
Joue-t-elle un rôle dans la direction de votre existence ?